jeudi 1 septembre 2016

BAS ETAGE

J'avais quelque temps délaissé cette tribune, devant l'accablement qui me prenait au vu de la médiocrité insigne de la littérature actuelle. Et voici qu'on m'apporte un roman dont l'auteur, c'est la quatrième de couverture qui le dit, a gagné par ses œuvres "une renommée internationale". Peste! On souhaiterait assurément un meilleur ambassadeur. La première phrase donne le ton : "Arthur Dreyfuss aimait les gros seins. Il s'était d'ailleurs demandé, si d'aventure il avait été une fille, [...] s'il les aurait eus gros ou petits" (p. 11). Si c'est là un roman à thèse, on voit de quel bois elle se chauffe. La pensée, ici, est aussi absente que la langue est pauvre. On trouvera, dès la première page, "une poitrine conséquente". Déjà, Littré disait : "Conséquent pour considérable est un barbarisme, que beaucoup de gens commettent et contre lequel il faut mettre en garde". Mais en a-t-on cure, lorsque, partout, la vulgarité domine : "Un con qui fait croire qu'il a un môme pour se taper des mères" (p. 83). Et partout, l'incapacité de mener une phrase à son terme. Huit mots. Six mots. Trois mots. Pas de verbes, ce serait trop demander. "Photos de dames pour leurs books. En tutu. Puis sans le tutu. Juste avec le collant transparent. Puis sans le collant. Puis en gros plan" (p. 83). On sombre dans une bassesse sans nom : "j'm'en fous de tes repères, Avatar c'est mondial et la couille de PP est là, c'est un truc franchouille" (p. 177). "Chacun eut envie de parler d'autres choses que de ces pauvres ploucs. Tous des cons. Tous les mêmes" (p. 176). Il paraît, dit encore la quatrième de couverture, que c'est "féroce et virtuose". J'ai cherché en vain, dans ces pauvres 264 pages, la férocité et la virtuosité. Je n'ai trouvé que la vulgarité et la bassesse. Du protagoniste, on nous dit : "Il n'avait pas lu Rimbaud" (p. 13). On s'en doute. L'auteur non plus, peut-être. Il est vrai que son héros regarde à la télévision des séries américaines ou compare les mérites de la ficelle picarde et du gratin au fromage (p. 111). On ne nous fait même pas grâce d'une éjaculation précoce (p. 198). Oh! Marcel Proust, Thomas Mann, Julien Gracq, où êtes-vous? Aujourd'hui, c'est Grégoire Delacourt.