samedi 2 avril 2022

DENATALITE, DEPOPULATION : ACTUALITE DE MALTHUS A LA FIN DU XIXè SIECLE

Le vieux débat entre Godwin (Of Population. An Enquiry concerning the Power of Increase in the Numbers of Mankind. Being an Answer to Mr. Malthus's Essay on that Subject, London, 1820) et Malthus (An Essay on the Principle of Population, as it affects the future Improvement of Society, with Remarks on the Speculations of Mr. Godwin, London, 1798) n'est pas éteint à la fin du XIXè siècle et semble même se raviver. On voit, en 1894, le romancier Alexandre Boutique le rappeler dans son roman précisément intitulé Les Malthusiennes, où il parle, d'autre part, d'un "malthusianisme, même préventif, décidément entré dans nos moeurs". Sans doute ce débat prend-t-il alors d'autres moyens, non plus seulement ceux de la rhétorique, mais ceux de la chirurgie, avec la vogue de l'ovariectomie, qui sert même d'épigraphe à un sonnet de Marius Boisson, adressé "Aux Femmes" (1896) : "l'extraction des ovaires est une opération fort à la mode". Emile Goudeau confirme, dans un autre roman (La Graine humaine, 1900) : "la plupart de ces dames n'offrent plus d'ovaires à la possibilité d'un maternel effort", auquel Boisson semblait répondre par avance dans un tercet propitiatoire : 

                       Et pour gravir les doux et terribles calvaires

                       De vos maternités... O Ventres triomphants,

                                   O femmes, nos amours, conservez vos ovaires!  

Léon Daudet dénoncera, de son côté, l'abus de cette pratique dans son roman Les Morticoles (1894). D'autres romans suivront, par exemple Stérile, de Daniel Riche (1890) ou Les Mères stériles, d'Henry de Fleurigny (1897).  Octave Mirbeau et même Jean Lorrain, que l'on n'attendait pas ici, joueront leur rôle dans ce débat. Et Goudeau, faisant dire à son orateur ridicule : "Pour l'Avenir des Races, pour la Grandeur du Pays, pour l'Agriculture, le Commerce, l'Armée, la Marine, l'Industrie et les Colonies, prodiguez aux vents de la vie, aux rayons du soleil, la splendide, la miraculeuse, la Divine Graine Humaine", se contentera d'ajouter : "refrain inutile et sans écho".